Le Sentiment d’une Montagne

 

Monter Christophe Tarkos en mêlant théâtre, musique, et art numérique, voilà comment Chloé Bégou, de La Colonie Bakakai, nous a présenté le projet en Janvier 2015. Une belle dream team de 9 personnes : 3 musiciens, 1 comédienne, 1 scénographe, 1 responsable de la spatialisation du son, 1 lighteux, 1 sondier, et votre serviteur à la vidéoprojection. Nous avons créé tous ensemble autour des recueils “Caisses” et “Le signe =”. Après 5 semaines de résidence étalées tout au long de l’année 2016, nous aboutissons à cette “création collective dirigée par Chloé Bégou” (Ça n’est pas moi qui l’invente, c’est écrit sur l’affiche. Cet oxymore me fait toujours rire, et pourtant il est étrangement vrai).

J’ai tenté de travailler la vidéoprojection comme Tarkos travaille les mots : en mastiquant la matière, en ressassant, en triturant. De plus je travaillais sur une scénographie mouvante. La montagne de Quentin Lugnier se déploie, elle est donc imprévisible de date en date. Impossible de mapper cette matière de manière traditionnelle.

La solution technique répondant à ces deux contraintes s’est donc rapidement imposée. Une caméra placée au plus près du point de projection filme la montagne en direct. L’image est traitée par différents algorithmes joués en direct depuis la régie. L’image ainsi créée est projetée sur la montagne. La caméra re-filme l’ensemble et l’image est ré-injectée. La boucle est bouclée. Un feedback vidéo d’une richesse inouïe, où le moindre changement de paramètre a des conséquences exponentielles. Une fois ce procédé trouvé, éprouvé, et stabilisé, le jeu s’installe en dialogue permanent avec l’éclairagiste (Fred Moreau) qui fournit évidemment la matière première en choisissant ce qu’il met en lumière, ce qu’il donne a mâcher à la caméra.

C’est tout ? Pas encore. Pour aller encore plus loin, avec Julien Belon, le spatialisateur sonore de l’équipe, nous décidons d’échanger des flux de données pour que la vidéoprojection réagisse tantôt aux sons des instrumentistes, tantôt à leur position dans l’espace, tantôt à la voix de la comédienne. Alors tout devient cohérent. Et personne dans le public ne comprend comment ça marche. “Magie du spectacle vivant !” Oh que oui, Monsieur. A pleine balle, monsieur.

Quelques expériences vidéos ont été filmées :